Auteur : Sergio Kokis

Dans L'art du maquillage, Willem ne veut pas vendre son âme, il se dit : « Je vais la louer pendant quelques années. Après je la reprends. » Or ceci est une impossibilité; on ne peut pas louer son âme puisqu'elle se fait au fur et à mesure qu'on vit. Si je fais un geste aujourd'hui, je viens de me transformer, je ne suis plus l'homme d'hier, ce geste a changé ma vie. Et de geste en geste, ma vie change. Je n'ai pas une vision essentialiste mais plutôt existentialiste de la personnalité. Je pense que la personnalité n'existe pas début et que, quand on meurt, elle est figée à jamais. Je voulais montrer quelqu'un qui se trompe, qui se dit : « Mon âme est éternelle, je peux la louer et après je la reprends. » C'est ça le thème du faux.

Ce thème du faux est idéal pour traiter un bildungs roman; c'est-à-dire un roman d'entrée dans la vie. Willem trouve une porte qui n'est pas la bonne. Il se pose le problème de l'identité. Il regarde les autres et essaie de les imiter, il essaie d'emprunter toutes ces identités pour créer la sienne, et tous ces emprunts tombent nécessairement à l'eau. Les deux thèmes, le faux et l'identité, s'unissent dans le concept du masque. Aujourd'hui, je suis un tel, mais je commencé aussi à être un autre. Cet autre-là, ça peut être un enfant que je retrouve en moi, mais qui est masqué par tellement de couches. Qu'est-ce qui est vrai ? Est-ce c'est ce petit enfant ou est-ce que c'est moi qui suis ici avec tous ces masques ? Qui est le vrai ? Ce thème de l'identité est fondamental. C'est pour ça que j'aime les romanciers qui le traitent. J'ai pensé : « Le faux, c'est ça… » parce qu'une vie d'artiste est une vie de faussaire. Sergio Kokis, extrait de l'interview

Auteur : Sergio Kokis

Brésilien d'origine, Sergio Kokis a connu une enfance tumultueuse au point d'être placé en institution de redressement pour vagabondage. Malgré tout, il poursuit ses études, fréquente les beaux-arts, se prépare même aux examens d'entrée en médecine. Militant de gauche, il est arrêté. L'État militaire l'accuse de « crimes contre la sécurité nationale ».

Il arrive au Québec par hasard après avoir postulé un emploi à l'hôpital psychiatrique de Gaspé. Après avoir obtenu un doctorat à l'Université de Montréal, il enseigne à l'UQAM, mais quitte cette institution pour se consacrer à la peinture et à l'écriture. Il travaille à temps partiel à l'hôpital Sainte-Justine à titre de psychologue.

Voilà un roman fascinant, exubérant, quasi incroyable qui raconte la vie du narrateur depuis sa tendre enfance jusqu'à la vingtaine dans le Brésil des années cinquante. À mesure que nous avançons dans le récit, nous voici entraînés dans un carnaval superbe et sordide où se mêlent la luxuriance du sud et la misère la plus abjecte. Une fresque absolument splendide qui traverse le Brésil de part en part.

« Le pavillon des miroirs » est en fait une remémoration. Peintre immigré au nord, c'est par les couleurs et les formes qu'éclatent en sa mémoire les moments forts de son enfance. Tout cela déborde la toile, submerge le narrateur. Qui suis-je ? se demande-t-il. Celui qui fut ou celui qui n'est pas ? Comment faire le pont entre cès deux Amériques ?

« Le pavillon des miroirs » est écrit dans la plus pure tradition sud-américaine. Des mondes antinomiques entrent en collision. On dirait un iceberg posé comme un faux drapeau sur un Brésil en flamme !

Une oeuvre magistrale, unique dans nos annales littéraires.