Auteur : Chester Himes

Fils d'un instituteur noir et d'une institutrice presque blanche, Chester Himes est né aux États-Unis en 1909 à Jefferson City (Missouri). Tout en étudiant à l'université de Cleveland (Ohio), il travaille pour gagner un peu d'argent. Victime d'un accident en 1928, il reçoit une forte indemnité qu'il perd au jeu. Pour se renflouer, il cherche des capitaux et… commet un vol à main armée en 1929.

Arrêté à Chicago, condamné à vingt ans de réclusion, il commence à écrire en prison. Libéré pour bonne conduite en 1936, il se marie et entreprend une histoire de Cleveland. Quand les États-Unis entrent dans la seconde guerre mondiale, les Noirs sont admis à devenir ouvriers dans les usines produisant pour la Défense nationale. L'expérience qu'en fait Chester Himes lui servira quand il met en chantier Lonely Crusade (La Croisade de Lee Gordon) en 1947, son second roman. Le premier, If He hollers let him go (S'il braille lâche-le), avait déjà reçu un très bon accueil. Il en sera de même pour les suivants.

Après son divorce en 1950, Chester Himes part pour l'Europe, au printemps 1953, se fixe en 1954 à Majorque où il écrit The Primitive. En 1956, vivant à Paris, Chester Himes aborde le genre policier.

Sa première oeuvre dans cette veine, La Reine des pommes, obtient le Grand Prix de littérature policière eu 1958. Les ouvrages suivants auront un égal succès.

Par un jour de printemps de l'année 1943, c'est à Los Angeles. en Californie. que l'on aurait trouvé le plus heureux des hommes – Lee Gordon que le comité syndical vient d'engager pour recruter des adhérents parmi les ouvriers noirs employés à la Comstock Aircraft Corporation. Il obtient pour la première fois un poste correspondant à ses aptitudes et à ses diplômes universitaires.

L'obstacle qui l'a empêché jusqu'à présent d'accéder à un poste digne de son intelligence réside en lui-même ou plutôt à sa surface : sa peau est noire et il vit dans un pays imbu de préjugés raciaux. Aussi est-il également le plus malheureux qui soit quand il envisage les difficultés qui l'attendent, car il redoute les Blancs.

Cette peur latente est son pire ennemi. Elle détruit son foyer, empoisonne ses rapports avec autrui, collègues ou inconnus. Pourtant quelque chose l'empêche toujours de s'y abandonner complètement et le contraint à mener une croisade solitaire contre lui-même et contre un monde hostile qui ne lui ménage ni coups ni pièges – lutte ardente, lutte sauvage d'un homme fragile mais fier, représentée avec une vérité qui accentue la valeur de cette oeuvre vigoureuse.

Auteur : Chester Himes

« J'estime que la culture américaine a produit deux variétés de l'espèce humaine qui n'ont jamais existé auparavant sur terre : 1° le mâle nègre, 2° la femelle blanche. » Chester Himes

Auteur : Chester Himes

Harlem : l'héroïque et « édifiante » histoire d'une championne de la fraternité interraciale.

Pour défendre la Cause Noire, encourager le rapprochement des races, en cette année-là, à Harlem, New York :

Mamie Mason jeûna, avec la persévérance de Mahatma Ghandi, pour s'insinuer dans une robe-fourreau en satin, taille quarante…

Edward Schooley, auteur noir, participa, en état d'ébriété et en silence, à une émission pourtant nommée « L'Auteur a son mot à dire »…

Art Wills, journaliste blanc et père de famille, préféra la compagnie d'une jeune personne, teint sombre et jambe légère, à celle de son chat qui avait la patte plâtrée…

Le Noir Révérend Riddick, exorciseur amateur, parcourut dans le plus simple appareil les quais de Harlem, à la poursuite du Dr Samuels, un possédé nu, de race blanche…

Dans sa cuisine, Moe Miller, célèbre reporter noir, se battit en duel avec un rat…

Mamie Mason aspira une bouffée d'air trop généreuse, en conséquence de quoi sa robe-fourreau de satin craqua sur toutes ses coutures…

Le Dr Kissock et le Dr Garrett, des Blancs d'un certain âge et au coeur sensible, s'appliquèrent à vérifier pragmatiquement cet aphorisme : « Plus noir est le fruit, plus doux en est le jus »…

Le leader Noir Wallace Wright, à la suite d'une erreur d'aiguillage, fut précipité dans les draps d'une dame blanche qui n'avait rien d'un fantôme…

Etc.

Et si l'on ne voit pas la relation entre la (bonne) Cause et ces étranges effets, il ne reste qu'à lire l'héroïque et édifiante histoire de Mamie Mason, championne de la fraternité (si l'on peut dire) interraciale.

Auteur : Chester Himes

D'une page à l'autre, il nous éblouit, il nous aveugle (le noir, toujours) avec la misère de Harlem, des viols, des crimes, des injustices, des révoltes; il remonte aux origines de l'Amérique, à l'esclavage, à la guerre de Sécession, et défilent à nouveau les cadavres (mutilés), les cadavres, toujours les cadavres.

Le Plan B (comme Black), c'est quoi au juste ? Oh ! moins que rien, le rêve fou d'un Noir pas fou du tout, et qui voudrait armer de fusils-mitrailleurs tous ses frères d'Amérique, pour qu'ils tirent dans la peau des Blancs, un bon coup, histoire de se faire respecter. (…) Une conclusion à tirer ? Chester Himes s'en garde bien. Trop gravement malade déjà en 1969, il ne put terminer la rédaction de cette fable. Mais, en aurait-il eu la force, qu'aurait-il pu dire ? Frédéric Vitoux, le Nouvel Observateur